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IFRS 9 – Un bouclier contre les risques de créances douteuses

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IFRS 9 - Un bouclier contre les risques de créances douteuses | business-magazine.mu

Depuis l’éclatement de la crise, les banques centrales se mobilisent pour soutenir l’économie réelle à grand renfort de liquidités, notamment à travers des opérations d’assouplissement quantitatif. À Maurice, l’on s’est engagé dans la même voie. Outre les différents plans de soutien mis à la disposition des entreprises sous le coup d’un stress financier, la Banque de Maurice a mobilisé pas moins de Rs 140 milliards, notamment en ponctionnant $ 2 milliards des réserves de change pour créer la Mauritius Investment Corporation et en stérilisant l’équivalent de Rs 60 milliards d’excédent de liquidités pour le financement du Budget 2020-21.

Cette mobilisation de ressources financières témoigne de la robustesse de notre système bancaire. Celui-ci repose sur des actifs de pas moins de Rs 1 300 milliards. Quant aux actifs en devises étrangères, ils totalisent plus de Rs 1 000 milliards comme suit: des réserves de Rs 280 milliards à la Banque de Maurice, alors que le niveau des actifs des banques commerciales s’élève à Rs 780 milliards.

Mais cette solidité financière pourrait être mise à rude épreuve si les banques n’exercent pas un contrôle accru, en particulier sur leur portefeuille de crédit. D’ailleurs, ces derniers mois, la Banque centrale a mis la pression sur les banques commerciales pour qu’elles adoptent des normes macro-prudentielles strictes. Car, en cette période de crise, où les banques soutiennent pleinement les agents économiques, les risques liés aux créances douteuses sont plus élevés. L’affaire de NMC Healthcare, qui fait toujours des vagues, avec six banques se retrouvant avec des créances irrécouvrables de Rs 4,5 milliards relatives à des prêts transfrontaliers, doit nous servir de mise en garde et nous rappeler qu’on ne peut plus se permettre de la mollesse. En cela, l’IFRS 9, qui est venue remplacer l’IAS 39 (Instruments financiers : comptabilisation et évaluation) est un outil précieux pour les banques dans leurs efforts de minimiser leur exposition aux actifs toxiques. Cette nouvelle norme, qui est entrée en vigueur en janvier 2018, constitue une transition majeure.

Dépréciation pour risque de crédit

Il faut savoir que sous l’IAS 39, les pertes sur les instruments n’étaient comptabilisées que quand celles-ci étaient encourues. De plus, la norme était considérée comme étant trop complexe. Et les provisions pour les pertes sur les actifs financiers, surtout dans le cas des prêts, arrivaient trop tardivement : on ne faisait que constater les dégâts. À contrario, avec l’IFRS 9, l’actif est évalué tout au long de sa durée de vie. Cela se fait à travers un modèle de dépréciation pour risque de crédit. Pour les actions (equities), celles-ci sont mesurées à leur juste valeur (fair value) avec des entrées dans le compte de pertes et de profits et le bilan (balance sheet).

À ce propos, Darren Li Shing Fong du Finance Department d’ABSA (Mauritius), fait ressortir que «l’IFRS 9 a apporté une approche cohérente du risque de crédit. Tous les produits ayant un impact potentiel sur le risque de crédit sont couverts par une méthodologie unique. Elle a donc contribué à réduire la complexité, notamment en ce qui concerne les critères d’évaluation multiples».

Il est rejoint par Andy Leon Son, Head of Finance à ABC Banking Corporation, qui, tout en soutenant que les normes en matière d’information financière n’étaient pas forcément complexes, est d’avis qu’il fallait toutefois adopter une norme, en l’occurrence l’IFRS 9, qui répond aux challenges d’un secteur financier en pleine transformation. «Il était important que la norme comptable s’adapte à l’environnement du marché. La nouvelle norme a sa propre complexité, car chaque banque doit concevoir et mettre en œuvre son propre modèle financier basé sur de nombreux points de données qui servent de base au modèle de pertes de crédit attendues. La partie la plus importante du processus consiste à s’assurer que, indépendamment de la complexité du processus, les informations partagées avec les lecteurs des états financiers sont clairement expliquées», observe-t-il.

De son côté, Ranjeeve Gowreesunkur, Chief Financial Officer à Bank One, estime qu’il est clair qu’en cette période de crise, l’IFRS 9 permet de renforcer le système financier car elle apporte une meilleure visibilité par rapport au provisionnement pour les créances douteuses. Il étaye ses propos : «L’IFRS 9 exige une modélisation des données financières. Si les modèles sont dotés d’un cadre approprié, et sont testés et révisés régulièrement, ils contribueront sans aucun doute à la stabilité du système financier. Le défi actuel est que chaque banque possède son propre modèle IFRS 9 et que celui-ci reflète son portefeuille, ce qui entraîne un manque de cohérence au sein du secteur. À titre d’exemple, pour deux expositions similaires d’une même société, deux banques exigeront des niveaux de provisionnement différents. Les montants requis peuvent parfois être sensiblement différents. Mais ce que nous constatons, c’est une augmentation générale des niveaux de provisionnement». 

Avec l’IFRS 9, les banques ont été en mesure de renforcer leur système de contrôle interne grâce à un meilleur processus de gestion de bout en bout. Comme le fait ressortir Rakesh Seesurn, Head of Risk à AfrAsia Bank, «l’IFRS 9 a incité les banques à évaluer de manière cohérente leur cadre général de tolérance au risque. Les banques sont désormais tenues d’analyser ces flux de données haute fréquence afin d’améliorer l’évaluation des risques de leurs produits, services et processus. En même temps, la norme IFRS 9 a créé un cadre qui garantit que les décisions de crédit sont cohérentes avec la stratégie globale ainsi que le portefeuille de produits bancaires. En vertu de l’IFRS 9, les banques sont tenues d’ajuster leur stratégie de portefeuille à un niveau plus granulaire en révisant soigneusement leurs limites sur les actifs risqués. Cela est particulièrement important dans le contexte de la Covid-19, où les banques doivent soutenir l’économie tout en gérant leurs risques de crédit et en évaluant les dommages permanents». 

Outre d’avoir permis aux banques de renforcer leur système de gestion, l’IFRS 9 est un instrument financier utile leur permettant d’améliorer leur processus de mise en œuvre de leurs stratégies. On le sait : en cette période de reconstruction, il est primordial d’adopter les meilleures normes comptables afin de protéger les banques et, in fine, tout le système financier contre les actifs toxiques. 


Évaluer à l’avance toute détérioration potentielle du crédit

En exigeant des banques qu’elles améliorent le suivi des performances et augmentent la portée de la gestion active du crédit, l’IFRS 9 leur permet d’évaluer à l’avance toute détérioration potentielle du crédit.

Il en résulte un système financier plus stable, car les banques sont en mesure de prévoir et de comptabiliser les pertes potentielles. 

«Grâce à leurs systèmes d’alerte rapide, les banques sont en mesure d’identifier les clients qui connaissent des difficultés et de les aider de manière proactive. Le modèle basé sur les pertes de crédit attendues intègre des informations prospectives qui préparent les banques à une éventuelle détérioration de la qualité du crédit. Dans cette optique, les banques peuvent revoir leurs stratégies d’optimisation du bilan et leurs initiatives de déploiement des liquidités pour s’adapter aux changements attendus», explique Rakesh Seesurn.





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