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Emploi à l’Ile Maurice : des nuages sombres obscurcissent l’horizon

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business mag 1474

Emploi à l’Ile Maurice : la crise a eu de lourdes retombées sur les finances des entreprises y compris sur les emploies à l’Ile Maurice. En quelques semaines, leur trésorerie s’est asséchée. Et sans le soutien de l’État, qui a assuré le paiement des salaires, nombre d’entre elles auraient été incapables d’assurer la pérennité de leurs opérations. Alors que l’on démarre l’année 2021, la situation reste extrêmement tendue dans le secteur privé, notamment en raison de la baisse de la demande et d’un manque de visibilité par rapport à la reprise. Il n’empêche que certains secteurs comme les Tic-BPO, la finance, les assurances et la distribution vont de l’avant avec leur campagne de recrutement. Ailleurs, c’est quasiment le calme plat.

La crise est profonde : l’économie mauricienne s’est contractée de 15,2 % en 2020. Soit une destruction de valeur de plus de Rs 75 milliards. Depuis l’éclatement de la crise, les entreprises sont en mode survie. Face à une grave crise de trésorerie et une chute importante de la demande, elles n’ont d’autre choix que de couper dans leurs dépenses. Jusqu’ici, le soutien de l’État au secteur privé au travers notamment du Wage Assistance Scheme a permis de limiter la casse et d’éviter qu’on ne se retrouve avec le scénario catastrophe de 100 000 chômeurs, ce qui aurait débouché inévitablement sur une crise sociale.
Selon les derniers chiffres, l’on comptait 62 200 chômeurs à fin septembre 2020. En outre, une étude publiée par Statistics Mauritius, fin décembre, révèle que le nombre de chômeurs a augmenté de 4 900 en l’espace de deux mois.

De l’avis du Chief Executive Officer d’Alentaris, Thierry Goder, il y a une série de facteurs qui ont permis de minimiser l’impact de la crise économique sur le chômage. D’abord, il y a la politique de soutien aux salaires. Ensuite, de nombreuses entreprises se sont restructurées en vue de rendre leurs organisations plus souples et plus agiles. «Depuis la crise, les chiffres annoncés par le Grand argentier ont eu l’effet d’une onde de choc. Clairement, les mesures mises en place pour soutenir l’activité économique et le Wage Assistance Scheme ont permis d’éviter des catastrophes. Quant aux entreprises qui se sont restructurées, elles ont su faire preuve de résilience. C’est une question d’atténuer l’hémorragie et de survie», observe-t-il.

Mais il faut reconnaître que la hausse de la demande fin décembre aura permis de redynamiser quelque peu l’économie. Les opérateurs, notamment ceux du secteur commercial, ont pu renflouer leurs caisses. Dans une tentative de prévenir des licenciements massifs en ce début d’année, le gouvernement a, de son côté, prolongé le moratoire contre les licenciements économiques jusqu’à juin prochain. C’est en sorte une façon de repousser l’échéance en espérant que d’ici là, il y aura une embellie de la situation et que la campagne de vaccination sera bien entamée. On pourra alors envisager un début de reprise dans le tourisme.

Analysant la situation, Thierry Goder se veut réaliste et prévient que le pire est peut-être à venir. «Pour l’heure, nous avons pu contenir des licenciements massifs. Toutefois, l’incertitude étant toujours présente par rapport à la situation de la Covid-19 – qui connaît des mutations dans de nombreux pays – on ne peut toujours pas entrevoir clairement le futur. En sus, nous savons aussi que bon nombre d’entreprises connaissent encore et toujours des difficultés. D’ailleurs, certaines d’entre elles mettent en ce moment même la clé sous la porte, ce qui influencera obligatoirement le taux de chômage. Ainsi, la menace d’un licenciement massif au terme du moratoire contre le licenciement est bel et bien présente», soutient-il. Avant de poursuivre que malgré l’attente d’une reprise économique annoncée pour le second semestre de 2021, la brume ne s’est pas désépaissie pour autant. «La découverte d’un vaccin est vraiment une bouffée d’oxygène qui redonne confiance au monde des affaires. Plus que cela, nous avons constaté aussi que des secteurs reprennent plus vite que prévu, à l’image du secteur financier.

«Néanmoins, d’un autre côté, il est aussi vrai que le virus est en train de se métamorphoser et nous sommes bien loin des taux de vaccination prévus. Tous ces facteurs illustrent que nous naviguons toujours en territoire inconnu», insiste-t-il. De plus, le manque de visibilité par rapport à la réouverture des frontières ne met pas en confiance les acteurs économiques. «C’est un sujet délicat, l’on est tous d’accord pour dire que la vaccination de la population est une priorité avant la réouverture des frontières. Toutefois, avoir plus de détails sur les plans du gouvernement permettrait à des entreprises de mieux se préparer pour ne pas être prises au dépourvu», fait-il remarquer. Dans les entreprises, l’heure est clairement à l’austérité. Bien évidemment, cela impacte les campagnes de recrutement.
Comme le souligne Jennifer Webb de Comarmond, directrice d’Adecco, un ensemble de facteurs jouent les trouble-fêtes sur le marché de l’emploi. «La crise économique impacte effectivement le marché du recrutement. La stabilité financière des entreprises étant mise à mal, elles ont du mal à promouvoir des postes. S’ajoute à cela, une problématique que l’on a recensé depuis un certain temps, qui est le ‘mismatch’ entre l’offre et la demande. En effet, il serait faux de rejeter toute la faute sur la Covid-19. Pour cause, nous observons depuis quelque temps déjà qu’il y a un manque de main-d’œuvre dans certains métiers. Il existe un gap entre les compétences recherchées et les compétences existantes. En somme, les sociétés recherchent des compétences qui ne sont pas produites et disponibles sur le marché local», fait-elle ressortir.

D’un point de vue plus général, Nicolas Goldstein, codirecteur et cofondateur de Talenteum, souligne que les talents mauriciens ont généralement la cote auprès des entreprises européennes. Cela dit, depuis la crise, il observe une diminution dans ce segment d’activité. «Dans le cas de ma start-up, j’ai observé que nos clients basés en Europe sont prudents et recrutent peu, pour ne pas dire moins qu’avant la pandémie»,
confie-t-il. Mais le télétravail laisse entrevoir de nouvelles opportunités. «Le travail à distance est en plein boom. C’est une aubaine pour encourager davantage les entreprises à recruter en dehors de leurs frontières, notamment à Maurice et en Afrique», affirme-t-il.

ESSAYER DE POSITIVER
Qu’on se le dise, ce n’est pas de sitôt que la situation s’améliorera sur le marché de l’emploi. Entre-temps, il s’agit de ne pas se laisser gagner par la sinistrose, mais d’essayer de positiver, souligne Jennifer Webb de Comarmond. «Il faudra faire preuve de résilience financière, mais aussi de résilience émotionnelle pour garder le cap et maintenir les équipes prêtes et opérationnelles lorsque les choses reprendront. Mais ce sera un long chemin avant la reprise. Il s’agit aujourd’hui de survivre et de faire preuve d’agilité et de leadership», constate-t-elle.

Au niveau d’Adecco, depuis le confinement, on avait vu venir une crise sur le marché de l’emploi et du recrutement. C’est ainsi que la société a mis au point un programme de formation pour préparer les gens à faire face à cette période difficile. «Depuis le confinement, notre équipe de formation travaille avec une vingtaine de formateurs pour développer un programme qui se focalise sur l’employabilité. À l’heure actuelle, nous avons formé plus de 1 000 participants. C’est une formation préventive qui permet aux employés d’acquérir des compétences nécessaires afin de rester agiles et employables ou encore de se positionner comme des entrepreneurs. Nous recommandons à tous ceux qui pensent sérieusement à se lancer, qui ont déjà une activité professionnelle parallèle ou qui hésitent encore à se lancer dans un travail à temps plein, de prendre le temps d’être formés afin d’acquérir les compétences nécessaires pour rebondir ou pour se lancer dans l’entrepreneuriat», conseille-t-elle.
Comme quoi, cette crise est une étape. Elle est l’occasion pour tout un chacun de faire une introspection et de voir comment on peut s’améliorer professionnellement et se donner les chances de réussir quand reviendront les beaux jours.

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